jeudi 17 janvier 2008

16 janvier : la mise en garde à vue

7 décembre 2007 : Va est heureux, son rêve d'enfant, celui pour lequel il consacre sa vie depuis plus de 5 ans se concrétise : un avenir se dessine pour lui en France, son patron, le gérant du restaurant lui propose un CDI. Sur le plan administratif, les choses sont en bonne voie, il n'attend qu'une réponse de la préfecture de Paris, mais il a confiance : il a passé sa journée du 12 novembre dans les locaux de la préfecture et on lui a dit que tout allait bien.

Ce que Va ne sait pas, c'est que son dossier déposé à Paris n'est pas recevable en l'état car il travaille désormais en Vendée.

16 janvier 2008 : Va est en garde à vue. Une menace d'expulsion pèse sur lui. Le dossier qu'il a déposé le 11 janvier à préfecture de Vendée serait-il refusé ?

Pour ces amis, il ne fait guère de doute que si l'expulsion est prononcée, elle le sera uniquement pour cause de quotas, pour la bonne note du ministre.


Retour en arrière, 7 ans auparavant.

Va est Cambodgien. La France, il l'aime et il souhaite la rejoindre, car au Cambodge, la France reste pour beaucoup le pays de la Liberté, le pays des Droits de l'Homme.
Mais la France n'est pour lui qu'un rêve lointain.
Certains rêvent d'îles, de palmier et de sable chaud.
Va, lui, rêve de devenir cuisinier en France.

Pour vivre, Va est gardien de maison. Cette année, en 2000, la maison est louée par des Français.
Va sympathise, la dame lui promet de l'aider à réaliser son rêve...

Durant 7 ans, la dame et lui vont correspondre.
Durant 7 ans, Va apprendre la cuisine, apprendre le français.
Durant 7 ans la dame, revenue en France, va chercher des solutions : trouver un premier patron qui ne portera pas le dossier au bout, en trouver un second qui accepte d'aller au bout.
Finalement, le 5 mars 2007, Va pose le pied sur le sol français avec un visa lui donnant le droit de travailler, son dossier d'immigration ayant été accepté par l'Anaem et la DDTE.

Après 1 mois 1/2, le patron du restaurant parisien ne souhaite finalement pas garder Va.
Il en faut plus pour décourager Va et la dame : un emploi saisonnier est trouvé sur la Côte Atlantique, aux Sables d'Olonne.
Va profite de ses quelques moments de répit pour perfectionner son français.
A la fin de la saison, le restaurateur lui annonce qu'il est prêt à le garder.

La suite, vous la connaissez.

Cette nuit, Va a dormi en cellule dans un commissariat français.
Depuis qu'il est sur le sol français, il a toujours veillé à respecter les lois de la République.
En 9 mois, il s'est fait des amis, a trouvé un travail dans un secteur qui manque de main-d'oeuvre qualifiée, et reconnu comme ayant besoin de main d'oeuvre étrangère.

Même si dans la journée nous apprenons que Va est libéré et que son dossier est finalement accepté, nous - ses amis - ne comprendrons pas pourquoi la France traite ainsi les gens qui l'aiment.

Mais une question se pose : Si Va avait été Suisse, Américain ou Australien, est-ce qu'il serait actuellement en garde à vue ?